L’associativité est notre nature
Quelle est la nature des liens unissant les êtres vivants ? Pourrait-elle être la même que celles unissant deux particules élémentaires ? Comment les liens du monde de l'”infiniment petit” peuvent nous aider à voir les liens qui unissent les êtres vivants ? Jean-Marie Pelt, par le terme d'”associativité”, nous a donné quelques pistes pour rencontrer notre vraie nature.
- Le regard d’un botaniste sur le sens du monde
Jean-Marie Pelt est parti de ce monde avant d’avoir eu de nouvelles données du robot Philae. Passionné par les plantes et les usages qu’en font les hommes, Jean-Marie Pelt l’était aussi par l’astrophysique (il espérait que Philae amènerait prochainement d’autres enthousiasmantes nouvelles. Peut-être a-t-il désormais accès à ces connaissances cosmiques ?).
Pharmacien-botanique-ethnopharmacologue, esprit curieux et vif, Jean-Marie Pelt était un incroyable conteur. Pionner de l’écologie en France, il a su faire prendre conscience de l’importance de la protection de notre environnement au plus grand nombre (notamment via des documentaires tels que « l’Aventure des Plantes »).
Président d’honneur de la Société Française d’Ethnopharmacologie, il restait infiniment simple dans les relations avec les étudiants que nous étions. Avec un sérieux sens de l’humour, il pouvait s’absenter quelques courtes minutes de son cours, et revenir avec ces simples mots « je viens de dire à TF1 tout le bien que je pense des OGM ».
Sa vision de la science est également teintée de spiritualité. Il croyait, comme beaucoup de grands scientifiques, à l’existence d’« principe créateur».
De manière innée, il savait partager ses passions et captiver son auditoire. Lors du congrès de l’ISPN (Paris) d’octobre dernier, plus de 2000 personnes étaient présentes pour l’écouter, puis l’ovationner pendant 15 minutes !!
Ce jour là, Jean-Marie Pelt, dans une conférence intitulée : « le monde a-t-il un sens ? », a développé un thème qui lui était cher : celui de l’associativité. Voici quelques-unes de mes notes, qui reflètent, imparfaitement, les propos de J.M.Pelt.
- Solidarité + coopération = associativité
Ce terme d’associativité est utilisé en mathématiques, notamment pour décrire des propriétés que possèdent l’addition et la multiplication.
Pour Pelt, l’associativité a pour racines la solidarité et la coopération. Il la définit comme l’association d’éléments simples qui se mettent ensemble pour donner des éléments plus complexes, aux propriétés nouvelles.
L’associativité démarre dès le Big Bang, il y a 13, 8 milliards d’années, avec la formation de particules (telles que les photons, les bosons, les quarks) qui s’associent entre elles. En s’associant, les particules acquièrent des propriétés nouvelles : ainsi les quarks, qui n’avaient pas de masse, en acquièrent une en s’associant aux bosons.
Par l’association des particules, la masse se structure.
- Associativité et création d’atomes dans les étoiles
Pour la formation des étoiles, 2 atomes d’hydrogène s’associent pour donner un atome d’hélium.
Quand 3 atomes d’hélium fusionnent, un atome de carbone est crée. Ainsi les différents éléments se forment.
Puis les atomes s’associent, pour créer des molécules, qui sont de plus en plus complexes.
- Associativité et création de la “molécule miracle”
Si l’on ne sait pas encore vraiment comment la vie a commencé, on sait que les briques de la vie sont des molécules très simples : plusieurs molécules de glucose donnent de l’amidon, plusieurs acides aminés forment des protéines, et des molécules très simples donnent cette molécule «miracle» : l’ADN, présente en chacune de nos cellules.
Comment est-il possible que les bases de l’ADN puissent se mettre dans le bon ordre ? Aux dires de Pelt, “la probabilité est celle d’atteindre une cible de 1 cm2 depuis…..13 milliards d’années lumière !!!!! Cette molécule est donc bien un miracle !”
Francis Crick – biologiste anglais Prix Nobel en 1962 avec James Watson pour la découverte de la structure de l’ADN – était bouddhiste et pensait qu’il y avait un « principe créateur » derrière ce miracle. Jean-Marie Pelt aimait rappeler que dans le monde, tout est question de précision. Il ajoutait que « les scientifiques mettent les questions embarrassantes (telles que celles de la précision de l’ADN) sous le tapis ».
- Associativité et êtres multicellulaires
L’ADN s’associe petit à petit avec de nombreuses molécules pour constituer les premiers être vivants que sont les bactéries. Les bactéries sont des cellules sans noyau. Dans nos cellules, l’ADN est localisé dans le noyau, lui-même flottant dans le cytoplasme.
Nos cellules (dites eucaryotes) seraient le résultat d’associations de bactéries (ou “procaryotes”) (hypothèse de la biologiste Lynn Margulis).
Peu à peu, les cellules s’associent entre elles pour donner des être multicellulaires.
Contrairement à la vision darwiniste de l’évolution, il est très probable que la coopération soit le maître mot de l’évolution, et que la compétition soit comme « chapeautée » par la coopération, qu’elle ne soit pas la base de l’évolution.
- Vivre l’associativité
Pour Pelt, l’associativité est la marche finale de l’évolution : c’est la combinaison de la solidarité, de l’amour, et de l’altruisme.
Il nous faut maintenant aller vers l’associativité, qui porte en germe l’amour. Et retrouver une forme de spiritualité, qu’elle soit laïque ou religieuse.
Pelt considère que l’associativité est la base de tout. Et que c’est donc celle-ci qu’il est important de suivre aujourd’hui, au détriment de tout esprit de compétition ou de concurrence.
Ce rappel que la solidarité et la coopération sont la base de la vie est une belle invitation à mettre de plus en plus de solidarité et de coopération dans nos vies.
La nature est coopération et solidarité. Chacun de nos atomes est coopération et solidarité. Nous sommes donc coopération et solidarité !
– Pour en savoir plus, vous pouvez lire « Le monde a-t-il un sens ?» de Jean-Marie Pelt et Pierre Rabhi.
“Toutes les cultures du monde se sont interrogées sur la question du « sens ». Dans notre société en perte de repères, la science, nous dit Jean-Marie Pelt, permet, en explorant le réel du big bang jusqu’à l’homme, d’apporter des éléments de réponse à cette question.
En effet, d’un bout à l’autre de la longue histoire de l’univers, l’évolution conduit des éléments simples à s’associer pour former des entités plus complexes, faisant émerger de nouvelles propriétés C’est ce qu’il appelle le « principe d’associativité ». Par de multiples exemples puisés dans la nature, Jean-Marie Pelt met en lumière le fait que la vie doit davantage à l’alliance qu’à la rivalité.
Pierre Rabhi défend avec lui ce principe en « intendant et serviteur de la Terre nourricière », comme il se définit lui-même. Pour lui, il appartient désormais aux hommes de poursuivre ce processus en privilégiant la coopération au détriment de la compétition, source de tensions et de conflits.
Jean-Marie Pelt et Pierre Rabhi, amis de longue date, mettent ici en commun, par-delà les désespérances de notre temps, une vision qui se veut optimiste mais qui exige, à leurs yeux, pour aboutir à un monde plus juste et fraternel, une authentique et massive « insurrection des consciences ». (Présentation de l’Editeur).
– Sur les conseils de Jean-Marie Pelt, vous devriez avoir plaisir à lire également Plaidoyer pour l’altruisme
“Matthieu RICARDa étudié la génétique cellulaire avant de se tourner vers le bouddhisme. Ordonné moine en 1978, il est l’un des spécialistes mondiaux du bouddhisme tibétain et l’interprète français du Dalaï-Lama. Confrontés à un monde en crise où règnent l’individualisme et le cynisme, nous n’imaginons pas la force de la bienveillance, le pouvoir qu’une attitude altruiste peut avoir sur nos vies et sur la société tout entière. Moine bouddhiste depuis près de quarante ans, Matthieu Ricard vit l’altruisme au quotidien, et nous démontre ici qu’il ne s’agit pas d’une utopie, mais bien d’une nécessité, voire d’une urgence. Dans ce livre nourri d’années de recherches et d’expériences, l’altruisme s’impose comme lasolution pour redonner du sens à nos vies et soigner les maux contemporains. ” Preuves scientifiques à l’appui, [ce] livre est un plaidoyer contre le règne de l’égoïsme et du chacun pour soi. Un message enthousiasmant. ” (Présentation de l’éditeur).
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